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RIENZI.

face, relevée seulement de place en place par des meurtrières et des crevasses étroites plutôt que des fenêtres. Elle formait un contraste frappant avec la gaieté d’alentour, les boutiques éclatantes, et le somptueux défilé qui venait de remplir l’espace au pied de ses murailles. Les jeunes gens parurent sentir involontairement ce contraste ; ils se reculèrent et se regardèrent l’un l’autre.

« Je devine votre pensée, Giacomo, dit Angelo, le plus gracieux et le plus âgé des deux. Vous vous dites que cette tour n’offre qu’un triste logement !

— Et je remercie mon étoile de ne pas m’avoir fait assez grand seigneur pour avoir besoin d’une si grande cage, repartit Giacomo.

— Pourtant, observa Angelo, elle en renferme un qui, par sa naissance, n’était point notre supérieur.

— Oh ! dites-moi donc quelque chose de cet homme étrange, dit Giacomo, reprenant son siége ; vous êtes Romain, vous devez tout savoir.

— Oui, répliqua Angelo en se redressant avec fierté. Je suis Romain ! Et je serais indigne de ma naissance si je n’avais pas déjà appris quels honneurs on doit rendre au nom de Cola de Rienzi.

— Cependant vos compatriotes de Rome l’ont presque lapidé, je crois, murmura Giacomo. En fait d’honneurs il areçu, je crois, plus de ruades que de pistoles. Pouvez-vous me dire s’il est vrai que Rienzi a paru à Prague devant l’empereur, qu’il lui a prédit que le pape et tous les cardinaux seraient assassinés et qu’on élirait un nouveau pape, un Italien, qui donnerait à l’empereur une couronne d’or avec le titre de souverain de Sicile, de Calabre et d’Apulie, et garderait pour lui une couronne d’argent, comme roi de Rome et de toute l’Italie[1] ? Et…

  1. Fable absurde, répétée par quelques historiens. (Note de l’auteur.)