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RIENZI.

gnols. Chantez, aimable sujette, chantez ; et choisissez le chant que notre bon ami, le seigneur Visdomini, a composé pour servir d’hymne de réception à ceux que nous admettons à notre cour. »

Mariana, à demi couchée sur le gazon à côté d’Adrien, prit le luth, et après avoir préludé un instant, fit entendre ce chant dont nous hasardons une traduction imparfaite.

CHANT DE LA DAME FLORENTINE.

« Jouissez des bienfaits de ce beau jour, car son lendemain est douteux, et sachez que le sort de la vie est bientôt par la douleur livré traîtreusement à la mort ?

La mort nous réclame tous ; ainsi, douleur, fuis loin de nous ! c’est déjà bien assez de ce lugubre maître ; les nuages qui environnent le jour d’un sombre voile, ne font qu’accélérer la nuit.

Aimez, jouissez, amusez-vous pendant que vous êtes encore sur terre ; c’est la leçon que vous enseigne le tombeau. La mort elle-même est l’amie de la gaieté, et décore la tombe de lauriers[1].

Pendant que je contemple les yeux que j’adore, mon âme reçoit une nouvelle vie ; si la joie est le partage des saints là-haut, c’est elle aussi qui nous prépare le mieux pour le ciel. »

À ce chant, qui fut vivement applaudi, succédèrent les contes légers et spirituels où les nouvellistes italiens ont fourni plus d’un modèle à Voltaire et à Marmontel, chacun ou chacune prenant à son tour la parole, et évitant avec une adresse égale toute image lugubre ou toute réflexion mélancolique qui pût rappeler à ces gracieux amis du plaisir le voisinage de la mort. À toute autre époque le caractère et les talents du jeune seigneur de Castello

  1. En Italie on plantait alors des lauriers sur les tombeaux