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L
PRÉFACE

la souffrance, jusqu’à ce que la vermine cruelle les eût privés de la vie.

Plus tard, on bâtit des cabanes, on prépara des peaux. Enfin, la découverte du feu hâta la civilisation. D’où nous vient ce bienfait ? De la foudre, ou des embrasements spontanés sous le choc des vents ? Quoi qu’il en soit, le feu défendit les hommes contre l’hiver, leur enseigna la cuisson des aliments, la fusion des métaux, la fabrication des armes et des outils. Les premiers engins de défense avaient été les mains, les ongles, les dents, les pierres, les bâtons. Puis vint l’or, l’argent ; puis le bronze ; le fer suivit. Alors commença l’empire de l’homme. Le cheval, le bœuf furent domptés ; les troupeaux subirent le joug et connurent les douceurs de l’étable. Les étoffes succédèrent aux fourrures. On fit des nattes de laine, puis des tissus.

La maison avait créé le champ, la propriété, les lois. Tout en exploitant les troupeaux, on plantait la terre. La femme avait son rôle ; la famille se groupait autour du foyer ; l’éducation des enfants assurait la durée des unions. La société succédait à la nature. L’homme, adouci par les caresses des siens, arraché à l’égoïsme stérile par les avantages réciproques de l’amitié, s’habitua à respecter les pactes, formels d’abord, puis tacites, qui le liaient pour la défense commune à ses voisins, à ses semblables. De là les fédérations particulières, l’hospitalité, puis les cités et les nations. Il y avait bien des violences, des crimes, des guerres ; il y en a encore, et nous savons assez,