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en littérateur, il est vrai, qu’en philosophe, mais dont il a partout répandu les louanges. À vous, à moi, à tous, il est revenu de proche en proche quelque chose de cet enseignement, que nous le sachions ou non. Sans les redites de M. Patin, Lucrèce n’aurait peut-être pas sa renommée en France. Car son poème est difficile à lire pour les profanes : beaucoup de professeurs même l’ignorent, il est fermé à la plupart des gens de lettres. M. Patin en a été l’interprète passionné, il l’a pris sous sa protection en un temps où il y avait quelque mérite dans cette espèce de patronage littéraire. On vante aujourd’hui Lucrèce parce qu’il n’est pas dévot, parce qu’il n’est pas classique ou pour d’autres raisons de ce genre, mais qui le lit, qui l’a lu ? Vous, moi et les traducteurs, et encore ! Pongerville, qui a parfois gentiment brodé sur le canevas, ne l’a jamais lu, c’est le cas de le dire, que dans sa propre traduction.

Je ne veux pas terminer cette lettre et ces réflexions peut-être un peu indiscrètes, mais que notre confraternité excuse, sans vous remercier encore du plaisir que vous m’avez procuré et des témoignages d’estime que vous avez accordés à mon livre dans votre préface : et puisque entre Romains, que nous sommes tous deux, le latin est de mise, je ne repousse pas un vers du vieux Névius qui demande à venir sous ma plume :


Lœtus sum laudari me abs te laudato viro.
 

Agréez, Monsieur, l’expression de mes hautes sympathies littéraires.

Martha.