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zon, t’en donne le signal ; (1, 230) et alors mène tes semailles jusqu’à la saison des frimas.

C’est pour régler nos travaux que le ciel a été partagé en régions diverses, et que douze astres marquent à travers le monde le cours brillant du soleil. Cinq zones embrassent tout l’espace du ciel. L’une est toujours resplendissante de lumière, toujours brûlée des feux du jour ; autour d’elle, à droite et à gauche, il en est deux autres qui s’étendent jusqu’aux pôles du monde, et sous lesquelles s’amassent des glaces éternelles et de noirs frimas. Entre elles et ce milieu brûlant des cieux, il y a deux zones tempérées que la bonté des dieux a accordées aux pauvres mortels : une route les coupe en oblique, dans laquelle se meut avec le soleil tout le système des astres. (1, 240) Au septentrion, vers la Scythie et les monts Riphées, la terre s’élève ; elle penche et s’abaisse au midi vers la Libye. Notre pôle tient toujours le point culminant des cieux ; mais l’autre n’est vu que par le Styx profond, et par les pâles ombres des enfers. Au pôle septentrional brille, en serpentant, le Dragon, et, comme un fleuve sinueux embrasse ses rivages, il embrasse les deux Ourses, qui jamais ne se baignent dans les eaux de l’Océan. Sur ces froides contrées pèse, dit-on, une nuit éternelle et silencieuse ; et les ténèbres les couvrent d’un voile de plus en plus épais : ou peut-être l’Aurore, en nous quittant, va les visiter, et leur rend le jour ; (1, 250) et quand le matin les coursiers de Phébus commencent à souffler sur nous leur haleine enflammée, là-bas le brillant Vesper rallume dans la nuit son flambeau.

Les astres ainsi connus, le ciel n’a pas de changements que nous ne puissions prédire : nous savons dans quel temps semer et récolter ; quand il faut soulever avec la rame le sein des mers perfides, quand il faut armer et lancer les flottes, quand c’est le moment d’abattre le sapin dans les forêts. Ce n’est donc pas en vain que nous observons le lever et le coucher des astres, et tour à tour les quatre saisons qui partagent l’année.

S’il arrive qu’une pluie froide retienne le laboureur dans sa maison, (1, 260) il peut vaquer à loisir à mille choses qu’il lui faudrait hâter dans un temps serein. Il aiguisera le soc émoussé de sa charrue ; il creusera des troncs d’arbres, pour les façonner en nacelles ; il marquera ses troupeaux, ou comptera ses vases à grains. Les uns affileront des pieux et des fourches, ou prépareront le saule d’Amérine pour en faire des liens à la vigne encore souple. C’est le moment de tresser en paniers les baguettes pliantes de l’osier : alors brûlez vos grains, alors broyez-les avec la meule. Il est même pour les jours de fête de doux travaux que n’empêchent ni les lois ni la religion : (1, 270) le droit des pontifes ne te défend pas d’amener un ruisseau dans tes prés, d’entourer tes moissons d’une haie, de tendre des pièges aux oiseaux, d’embraser les ronces, et de plonger tes bêlantes brebis dans une eau salutaire. Que de fois, pressant les côtes d’un âne rétif qu’il a chargées d’huile ou de simples fruits des champs, le paysan le