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DE L’ASTROLOGIE.

soit fils de Vénus, Minos de Jupiter, Ascalaphus de Mars, Autolycus de Mercure ? Chacun d’eux sans doute était chéri des dieux, et, au moment de leur naissance, Vénus, Jupiter ou Mars avait l’œil sur eux. Car ceux des dieux qui dominent sur les hommes lorsqu’ils viennent au monde, peuvent passer pour leurs pères ; ils ont sur eux la même influence ; ils leur donnent le teint, la forme, l’habileté, l’esprit… Minos fut roi, parce que Jupiter le dominait ; Énée dut sa beauté à l’influence de Vénus ; Autolycus fut voleur[1], parce que Mercure l’avait porté au vol.

21. Jamais Jupiter n’enchaîna Saturne, ni ne le précipita dans le Tartare, jamais il ne trama contre lui rien de ce qu’ont imaginé les hommes. Saturne roule dans une orbite éloignée de notre cercle ; son mouvement est très-lent et les hommes ont grand’peine à l’apercevoir : de là l’on a dit qu’il était immobile et comme enchaîné ; quant à l’immense profondeur de l’air, on lui a donné le nom de Tartare.

22. C’est surtout par les poésies d’Homère et celles d’Hésiode qu’on peut se convaincre de la concordance des faits de l’astrologie. Quand le poëte nous parle de la chaîne de Jupiter, des traits lancés par le Soleil, il me semble qu’il désigne les jours : et j’en dis autant des villes, des chœurs de danse et des vendanges que Vulcain représente sur le bouclier d’Achille. Ce qu’on raconte de l’adultère de Mars et de Vénus révélé à tous les dieux, n’est qu’une invention astrologique, c’est la conjonction de Mars et de Vénus qui sert de matière au chant d’Homère. Dans d’autres passages il définit leur influence respective. Il dit de Vénus[2] :

Que les plaisirs d’hymen soient sous sa douce loi.


et pour la guerre[3] :

Que le rapide Mars, que Minerve y président.

23. Convaincus de ces vérités ; les anciens se servaient très-souvent de la divination et ne la regardaient pas comme superflue. Ils ne fondaient pas de ville, n’élevaient pas de murailles ; ne livraient pas de combat, ne se mariaient pas, sans avoir pris conseil des devins, dont ils ne séparaient pas les oracles de la science astrologique. À Delphes, la vierge prophétique est un symbole de la vierge céleste ; le dragon placé sous le trépied n’est doué de la voix que parce qu’il y a un dragon qui brille

  1. Voy. Homère, Odyssée, XIX, v. 396.
  2. Iliade, V, v. 429.
  3. Id., Ibid.