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Et nous n’avons rien compensé ! Quel drame d’être mère, et trop belle ! drame, sans dénouement qu’être une femme fière ! Je me prosterne devant ton sort maternel si fatalement héroïque que tu n’avais pas même eu à en décider.

Ma mère, je baise tes pieds bénis de condamnée à la beauté, condamnée par un rîte né et mort avec toi.

Nous t’avons fatiguée, tiraillée sans merci. L’enfant ne se rassasie pas d’user sa mère.

Jamais ta douce vie défleurie pas nos luttes n’est autant descendue en moi…

Quand je marche au bras de mon compagnon, docile à moi, prompt au moindre bonheur, je pleure de beauté, de ta beauté à toi, qui voulus monter seule au calvaire qu’est le second âge des femmes !

Pourquoi n’as-tu voulu, dans tes avant-dernières années, que le difficile amour maternel ? Que n’as-tu admis le facile amour de l’homme, vers la fin, pour user commodément ton goût de donner ?

Pourquoi as-tu choisi nos rudes âmes d’enfants — femmes que la mère ne peut plus franchir ni aider ?

Lorsque tu devins faible, que ta tâche s’est faite ardue !

Quand je voulus te plaindre, moi d’un cœur moins royal, amolli de confort, tu m’imposas silence, interdisant qu’on te consolât.

On ne console pas de la splendeur morale ! Tu ne voulais pas perdre une épine de ta couronne. La pire peine est donc en haut du Gol-