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concours du peuple dans la guerre contre les Volsques, consentit au partage du territoire de Pomptinum (Marais-Pontins) enlevé à ce peuple par Camille, et déjà livré aux empiétements des grands[1]. Ces concessions partielles ne pouvaient néanmoins satisfaire les plébéiens ni réparer les injustices ; la loi licinienne fit triompher les prétentions du peuple, combattues depuis cent trente-six ans[2] ; elle ne privait pas complètement les nobles de la jouissance des terres injustement usurpées, mais elle en limitait la possession à cinq cents jugera (cent vingt-cinq hectares). Cette répartition faite, le terrain restant devait être distribué aux pauvres. Les propriétaires étaient obligés d’entretenir sur leurs terres un certain nombre d’hommes libres, afin d’augmenter la classe dans laquelle se recrutaient les légions ; enfin on fixa le nombre des bestiaux de chaque domaine pour restreindre la culture des prairies, en général la plus lucrative, et augmenter celles des terres labourables, ce qui affranchissait l’Italie de la nécessité d’avoir recours aux blés étrangers.

Cette loi de Licinius Stolon assurait d’heureux résultats ; elle réprimait les empiétements des riches et des grands, mais ne procédait dans ses effets rétroactifs qu’avec modération ; elle arrêtait l’extension inquiétante des domaines privés aux dépens du domaine public, l’absorption des biens de tous par quelques-uns, la dépopulation de l’Italie, et par conséquent l’affaiblissement des armées[3].

De nombreuses condamnations infligées pour infractions à la loi Licinia prouvent qu’elle fut exécutée, et pendant deux

  1. Tite-Live, VI, xxi. Il paraît que les Marais-Pontins étaient alors très-fertiles, puisque Pline rapporte, d’après Licinius Mucianus, qu’ils renfermaient plus de vingt-quatre villes florissantes. (Histoire naturelle, III, v. 59, édit. Sillig.)
  2. Tite-Live, VI, xxxv à xlii. — Appien, Guerres civiles, I, viii.
  3. Voyez le remarquable ouvrage de M. A. Macé, Sur les lois agraires ; Paris, 1846.