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publics. Il y avait donc peu à compter sur un retour bienveillant de la part de l’assemblée, et, si la distribution des commandements était de sa compétence, l’histoire offrait des exemples de provinces données par un vote populaire : la Numidie fut assignée à Marius, sur la proposition du tribun L. Manlius, et L. Lucullus, après avoir reçu du sénat la Gaule cisalpine, obtint du peuple la Cilicie[1]. C’est ainsi que le commandement de l’Asie avait été déféré à Pompée. Fort de ces précédents, Vatinius proposa au peuple de confier à César, pendant cinq ans, le commandement de la Gaule cisalpine et de l’Illyrie, avec trois légions[2]. Pompée appuya cette motion de toutes ses forces. Les amis de Crassus[3], Clodius[4] et L. Pison votèrent en faveur de la loi.

Au premier abord, il semble étonnant que la proposition du tribun concernât seulement la Gaule cisalpine, sans parler de l’autre côté des Alpes, où se présentaient uniquement les chances d’acquérir de la gloire ; mais, en y réfléchissant, on découvre combien cette manière de poser la question était habile et politique. Solliciter à la fois le gouvernement des deux Gaules eût pu paraître exorbitant et exposer à un échec. Demander le gouvernement de la Gaule proprement dite offrait des dangers, car, si on l’avait accordé sans y joindre la Gaule Cisalpine, dévolue à un autre proconsul, César se serait trouvé complètement séparé de l’Italie, dans l’impossibilité de s’y rendre pendant l’hiver et de conserver avec Rome des relations suivies. Le projet de loi de Vatinius, au contraire, n’ayant pour objet que la Gaule cisalpine et l’Illyrie, on ne pouvait guère refuser un commandement contenu dans les bornes ordinaires, et César acquérait par là une base d’opérations solide, au milieu de populations

  1. Plutarque, Lucullus, ix.
  2. Suétone, César, xxii. — Plutarque, César, xiv.
  3. Plutarque, Crassus, xvii.
  4. Appien, Guerre civiles, II, xiv.