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duellement responsable. Rome, avec ses limites resserrées, n’avait plus besoin de la concentration de l’autorité dans une seule main, mais il lui fallait un nouvel ordre de choses qui donnât aux grands le libre accès au pouvoir suprême et secondât, par l’appât des honneurs, le développement des facultés de chacun. L’important était de créer une race d’hommes d’élite qui, se succédant avec les mêmes principes et les mêmes vertus, perpétuassent, de génération en génération, le système le plus capable d’assurer la grandeur de la patrie. La chute de la royauté fut donc un événement favorable au développement de Rome.

Les patriciens occupèrent seuls pendant longtemps les charges civiles, militaires et religieuses, et, ces charges étant la plupart annuelles, il n’y avait au sénat presque aucun membre qui ne les eût remplies, de sorte que cette assemblée se trouvait composée d’hommes formés aux luttes du Forum comme à celles du champ de bataille, façonnés aux difficultés de l’administration, enfin dignes, par une expérience durement acquise, de présider aux destinées de la République.

Ils n’étaient pas classés, ainsi que dans notre société moderne, en spécialités envieuses et rivales : on n’y voyait pas l’homme de guerre mépriser le civil, le jurisconsulte ou l’orateur se séparer de l’homme d’action, ou le prêtre s’isoler de tous. Pour s’élever aux dignités et mériter les suffrages de ses concitoyens, le patricien était astreint, dès son jeune âge, aux épreuves les plus diverses. On exigeait de lui l’adresse du corps, l’éloquence, l’aptitude aux exercices militaires, la science des lois civiles et religieuses, le talent de commander une armée ou de diriger une flotte, d’administrer la ville ou de commander une province ; et l’obligation de ces divers apprentissages non-seulement donnait un plein essor à toutes les capacités, mais elle réunissait, aux yeux du peuple, sur le magistrat revêtu de dignités diffé-