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femme Mucia pendant son absence, et il se décida à la répudier[1].

L’envie, ce fléau des républiques, se déchaîna contre lui. Les nobles ne cachaient pas leur jalousie ; ils semblaient se venger de leurs propres appréhensions, auxquelles venaient encore se joindre des ressentiments personnels. Lucullus ne lui pardonnait pas de l’avoir frustré du commandement de l’armée d’Asie. Crassus était envieux de sa célébrité ; Caton, toujours ennemi de ceux qui s’élevaient au-dessus des autres, ne pouvait lui être favorable, et lui avait même refusé la main de sa nièce ; Metellus Creticus conservait un souvenir amer des efforts tentés pour lui contester la conquête de l’île de Crète[2], et Metellus Celer était blessé de la répudiation de sa sœur Mucia[3]. Quant à Cicéron, dont l’opinion sur les hommes variait suivant leur plus ou moins de déférence pour son mérite, il trouvait son héros d’autrefois sans droiture et sans élévation[4]. Pressentant le mauvais vouloir qu’il allait rencontrer, Pompée mit tout en œuvre et dépensa beaucoup d’argent pour faire arriver au consulat Afranius, un de ses anciens lieutenants ; il comptait sur lui pour obtenir les deux choses auxquelles il tenait le plus : l’approbation générale de tous ses actes en Orient et une distribution de terres à ses vétérans. Malgré de vives oppositions, L. Afranius fut nommé avec Q. Metellus Celer. Mais, avant de présenter les lois qui l’intéressaient, Pompée, qui jusque-là n’était pas rentré dans Rome, demanda le triomphe. On le lui accorda seulement pour deux jours ; la

  1. Cicéron, Lettres à Atticus, I, xii.
  2. Metellus faisait la conquête de la Crète, lorsque Pompée envoya un de ses lieutenants pour le déposséder, sous prétexte que cette île était comprise dans son grand commandement maritime.
  3. Dion-Cassius, XXXVII, xlix.
  4. « Jamais de droiture ni de candeur, pas un mobile honorable dans sa politique ; rien d’élevé, de fort, de généreux. » (Cicéron, Lettres à Atticus, I, xiii.)