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l’extrémité où l’on m’a réduit, j’embrasse le seul parti qui reste à un homme de cœur pour défendre sa position politique. Je voudrais t’en écrire davantage, mais j’apprends qu’on prépare contre moi les dernières violences. Je te recommande Orestilla et la confie à ta foi. Protège-la, je t’en supplie par la tête de tes enfants. Adieu. »

Les mêmes sentiments animaient les insurgés sous les ordres de Mallius. Ils se révèlent par ces paroles : « Nous prenons les dieux et les hommes à témoin que ce n’est ni contre la patrie que nous avons saisi les armes, ni contre la sûreté de nos concitoyens. Nous voulons seulement garantir nos personnes de l’oppression, nous, malheureux indigents, qui, grâce aux violences et à la cruauté des usuriers, sommes la plupart sans patrie, tous voués au mépris et à la pauvreté. Nous ne demandons ni le pouvoir ni les richesses, ces grandes et éternelles causes de guerres et de dissensions entre les humains ; nous ne voulons que la liberté, à laquelle tout homme de bien ne renonce qu’avec la vie. Nous vous en conjurons, vous le Sénat, prenez en pitié de malheureux concitoyens[1]. »

Ces citations indiquent assez le véritable caractère de l’insurrection, et ce qui prouve que les partisans de Catilina n’étaient pas si dignes de mépris, c’est leur persévérance et leur détermination. Le sénat, ayant déclaré Catilina et Mallius ennemis de la patrie, promit une amnistie entière et deux cent mille sesterces[2] à quiconque abandonnerait les rangs ennemis ; « or il ne se trouva pas, dit Salluste[3], un seul homme dans une si grande multitude, que l’appât de la récompense déterminât à révéler la conjuration, pas un qui désertât le camp de Catilina, tant était fort le mal qui,

  1. Salluste, Catilina, xxxiii, Discours des députés envoyés par Mallius à Marcius Rex.
  2. Salluste, Catilina, xxx.
  3. Salluste, Catilina, xxxvi.