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fondent les empires et les vertus que la guerre enfante. Ainsi, pour tous les citoyens, égalité de droits ; devant les dangers de la patrie, égalité de devoirs et suspension même de la liberté. Aux plus dignes les honneurs et le commandement. Point de magistrature à qui n’a pas servi dans les rangs de l’armée. L’exemple est donné par les familles les plus illustres et les plus riches : à la bataille du lac Régille (258), les principaux sénateurs sont confondus dans les rangs des légions[1] ; au combat près du Crémère, les trois cent six Fabius, qui tous, selon Tite-Live, étaient capables de remplir les plus hautes fonctions, périssent les armes à la main. Plus tard, à Cannes, quatre-vingts sénateurs, qui s’étaient enrôlés comme simples soldats, tombent sur le cliamp de bataille[2]. Le triomphe est accordé pour les victoires qui agrandissent le territoire, mais non pour celles qui font recouvrer le sol perdu. Point de triomphe non plus dans les guerres civiles[3] : le succès, quel qu’il soit, est toujours un deuil public. Les consuls ou proconsuls cherchent à être utiles à la patrie sans fausse susceptibilité ; aujourd’hui au premier rang, demain au second, ils servent avec le même dévouement sous les ordres de celui auquel ils commandaient la veille. Servilius, consul en 281, devient, l’année suivante, lieutenant de Valerius. Fabius, après tant de triomphes, consent à n’être que le lieutenant de son fils. Plus tard, Flamininus, vainqueur du roi de Macédoine, redescend par patriotisme, après la victoire de Cynoscéphales, au grade de tribun des soldats[4] ; le grand Scipion

  1. « Vous voyez ici tous les principaux sénateurs qui vous donnent l’exemple. Ils veulent partager avec vous les fatigues et les périls de la guerre, quoique les lois et leur âge les exemptent de porter les armes. » (Discours du dictateur Postumius à ses troupes ; Denys d’Halicarnasse, VI, ix.)
  2. Tite-Live, XXII, xlix.
  3. Valère Maxime, II, viii, 4, 7.
  4. Plutarque, Flamininus, xxviii.