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ESSAI HISTORIQUE SUR LE NORD DE L’INDO-CHINE.

sait que la race de ce nom habite aujourd’hui la région comprise entre Li-kiang et Oue-si. La première de ces deux villes ne fut fondée qu’après la conquête mongole. Ta-ly, où régnait le roi Toan-se, fut pris sans coup férir. Toan-se fut maintenu en possession du trône. Le pays des Tou-fan fut plus difficile à soumettre, et les généraux indigènes Siun tato et Yn tali se défendirent longtemps contre le général tartare Ou-leang-ho-tai. Celui-ci, après les avoir vaincus, incorpora leurs troupes dans son armée et s’en servit comme d’une avant-garde pour soumettre les peuplades voisines des Pe man, des Ou man, des Koue man et les royaumes de Lolo et d’Ape (1255). Il est difficile de donner une identification précise de tous ces noms ; ils désignent quelques-unes des tribus d’origine si variée et si complexe qui habitent les bords de la Salouen, du Cambodge et du Mékong entre les 24e et 30e degrés de latitude.

En 1300, sur les conseils du ministre Ouen-tcé, l’empereur Timour-han ou Tching-tsong, entreprit de soumettre le royaume de Pa-pe si fou. Cette expédition commandée par le général Lieou-chin, paraît avoir été malheureuse et les populations du Yun-nan furent soumises à des impôts exorbitants pour nourrir l’armée chinoise. Chen-tsieï, femme d’un Tou-se, ou chef indigène du pays de Choui-si, leva l’étendard de la rébellion ; les Miao-tse, les Lao-tse et autres peuples de ces quartiers, dit le Toung kien kang mou[1], se joignirent à elle, et le vice-roi du Yun-nan, qui était un des fils de Khoubilaï Khan, dut se joindre à Lieou-chin pour comprimer cette révolte.

En même temps, les troupes que l’empereur avait envoyées en Birmanie furent attaquées à leur retour dans le pays de Kin-tchi, et beaucoup de soldats furent massacrés. Le général mongol Tchaour, envoyé pour rétablir l’ordre, fut battu par les Kin-tchi et leurs alliés. Lieou-chin fut vaincu par Song-long-tsi, chef des rebelles du Yun-nan, et perdit une grande partie de son armée et tous ses bagages (1302). Pour faire face à cette multiple rébellion, il fallut faire marcher les troupes du Se-tchouen, du Yun-nan et du Hou-kouang. Lieou-koue-kie fut mis à leur tête. En même temps, une seconde armée fut rassemblée sous les ordres de Yesou-tair. Le mal, en effet, faisait des progrès rapides : les tribus Ou-san, Ou-mong (aujourd’hui pays de Tchao-tong), Tong-tchouen, Mang, Ou-ting, Oue-tcheou, Po-ngan, s’étaient jointes à Chen-tsieï et à Song-long-tsi. Lieou-koue-kie battit une première fois les rebelles (1303), puis une seconde fois à Mete-tchuen, où l’héroïne Chen-tsieï fut prise et exécutée. Song-long-tsi fut livré par un de ses neveux. La mort de ces deux chefs mit fin à la guerre. Le général chinois Lieou-chin fut condamné à mort pour avoir occasionné cette révolte.

En 1309, le royaume de Pa-pe si fou et les barbares du grand et du petit Tche-li firent des incursions sur les frontières de l’empire ; le général Suon-tchiroue, envoyé contre eux, se laissa corrompre, et ses troupes qui s’étaient débandées pour piller, furent mises en déroute.

En 1311, année de l’avènement de l’empereur Gin-tsong, Pa-pe si fou et Tche-li envoyèrent des éléphants privés en signe d’hommage.

  1. De Mailla, op. cit., t. IX, p. 476.