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les bureaux tranquilles, j’écarterai de mon esprit par un artifice salutaire toute inspiration éventuelle de gérer les affaires publiques.

Et, de fait, tout allait pour le mieux du monde. Personne ne se plaignait, ni le peuple, ni le souverain ; — ou du moins, les rares mécontents accusaient « les ministères » qui, narquois derrière leur collectivité anonyme, et d’ailleurs très satisfaits de travailler sans direction, rendaient grâces à la destinée.


Pausole avait poussé si loin le génie abdicateur qu’il ne gouvernait même pas ses femmes.

À la tête du harem, et cumulant la fonction de Grand-Eunuque avec celle de Maréchal du palais, un personnage singulier administrait au nom du Roi.

C’était le huguenot Taxis.

Étriqué, méticuleux, de profil concave et d’œil fourbe, âme intraitable et présomptueuse, Taxis jouera dans la suite du récit (disons-le pour plus de clarté) le rôle toujours nécessaire du Personnage antipathique. Pausole l’avait cependant choisi, et personne ne pouvait douter que le Roi n’accordât à son fonctionnaire une part d’estime, de confiance et presque d’admiration.