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Ce fut pendant la vingtième année de son règne, qu’un jour, après tant de jours paisibles, le Roi Pausole ressentit les difficultés de la vie et le poids d’une âme perplexe.

Il s’était levé, ce matin de juin, très longtemps après le soleil, et, doucement bercé par sa mule Macarie, il se laissait aller à sa chaire de justice.

De nombreux serviteurs accompagnaient sa promenade, l’un portant ses cigarettes et l’autre son parasol, la plupart ne faisant rien.

Aucun d’eux n’était en armes. Le Roi sortait toujours sans gardes, par ostentation du soin qu’il prenait d’être aimé plutôt que craint. — Crainte ne peut toujours durer, disait-il ; ni endurer ; — au lieu que l’amour populaire est un sentiment perpétuel vit de souvenirs, accueille les moindres gestes comme des bienfaits nouveaux et ne demande guère autre chose que d’être vivement estimé par celui qui en est l’objet.

La cour de justice que le Roi tenait chaque jour sous un cerisier de ses jardins avait su faire accepter de tous son arbitrage sans appel, mais librement consenti. Aucun autre tribunal n’avait con-