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Le lever du rideau était Socrate et sa femme, de Banville. Silvain jouait Socrate, et ma foi très bien. Il y a deux Socrates dans cette comédie : le Socrate philosophe, quand il est avec ses amis, et le Socrate mari, avec sa femme. Ce sont deux hommes différents, et Silvain jouait également bien l’un et l’autre. Il se faisait des airs bonasses, souriants, résignés, dans ses scènes de ménage, à mourir de rire. Kolb jouait Xanthippe, assez bien. Le reste ne vaut pas l’honneur d’être nommé. Frémaux, actrice aux Français ! Mais Louise jouerait mieux qu’elle, ma parole ! Pour le plaisir des yeux on avait exhibé Persoons au premier rang, tout près de la rampe, pour qu’on pût admirer ses beaux cheveux, son charmant visage et ses jolis bras. Elle n’avait qu’une phrase à dire, et c’est bien heureux !

Seconde pièce : le Luthier de Crémone. C’était là dedans qu’était le great attraction, le clou de la soirée : Thiron. Il n’a malheureusement qu’un rôle épisodique, mais il n’est pas possible de jouer Maître Ferrari avec plus de jovialité, de rondeur et de fatuité. C’était du reste un rôle fait pour lui : Maître Ferrari est ivre tout le temps.

Ce n’est pas Thiron cependant qui m’a fait le plus de plaisir hier soir. C’est un jeune acteur, maigre, fluet, petit, mais qui n’en a pas moins un talent bien remarquable : c’est Le Bargy. C’est peut-être parce que je vais peu au théâtre,