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C’est donc tous les jours fête, pour moi ? Ah ! quelle surprise !

J’étais allé hier soir à la représentation de retraite de Dumaine, attiré surtout à l’Opéra par l’annonce que Mounet-Sully jouerait Karloo dans Patrie, et le nom de cet homme est pour moi d’un tel éblouissement que je n’avais pas vu sur l’affiche Melba, Subra, Mauri, Judic, et d’autres.

On venait de jouer deux actes d’Hamlet, l’acte du spectre et l’acte de la folie, et je rentrais en salle pour écouter le numéro suivant du programme : « Intermède : Duo de Lohengrin, par Nuitter et Wagner ».

Et ma joie d’entendre enfin de la vraie musique, dans le merveilleux temple de Garnier, se tempérait à l’idée qu’on allait jouer un morceau tronqué, mutilé, sans vie, comme dans un concert…

Mais tout à coup l’accord de ré, le trille furieux, la gamme de violons… Dieu ! c’est la marche triomphale ! Ah ! à la bonne heure ! Et les trombones éclatent, tonnent, bondissent… Hélas ! pourquoi tout à l’heure le rideau va-t-il se lever sur un habit noir et une robe de bal !

Mais non. À mesure que le rideau se lève, on distingue un lit de repos, des murs à fresques, une porte ouverte, et des enfants qui entrent, porteurs de torches et chantant le chœur des noces…

Oh ! quelle merveilleuse Elsa que Rose Caron ! Elle a des moments d’inspiration divine ; et comme