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sur le « Naturalisme survivant ». Je signais Claude Moreau. Mais, hélas ! la revue tombe et mon article me reste.

Deux mois après, rentré de Savoie je le regarde, — qu’en faire ? Le donner ailleurs, parbleu ! Mais à qui ? Art et Critique ? pourquoi pas !

Néanmoins, j’ai attendu encore un mois, par peur d’un refus, comme s’il devait s’améliorer en vieillissant ! Enfin, le 21 octobre, j’entre timidement, — oh ! si timidement ! — dans le bureau de la revue, où séchait sur sa chaise un certain Georges Roussel, secrétaire. Je lui tends mon manuscrit qui tremblait dans ma main, et je balbutie : « Article… si vous voulez… pour la revue… » Et lui, presque aussi timide que moi, bégaye : « Heuh… certainement… nous l’examinerons… Nous… nous verrons ce que c’est… sera inséré. » Mais j’étais déjà dans la rue.

Et comme ils ne sont pas tendres, rue des Cannettes, comme ils répondent, dans un petit courrier, aux jeunes filles de renoncer à la littérature pour s’essayer à la couture ou à la repopulation, — et aux jeunes critiques : « Non, nous ne sommes pas ennemis d’une douce gaieté, mais votre article dépasse les bornes », — je m’attendais tranquillement à lire dans le courrier suivant : « On ne vaticine pas dans Art et Critique, allez porter votre article au Lotus Bleu. »

J’ouvre le numéro deux jours plus tard : rien