Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 9.djvu/324

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

rais arraché de mon cœur le hideux et grossier désir, afin de n’éprouver en nulle occasion d’autre frisson que le frisson du beau.

*

Oh ! oui ! prêcher cela. Enseigner que l’idéal ne se morcelle pas, qu’il n’y a qu’un but, qu’une raison, qu’une loi… oh ! qu’une seule chose est nécessaire. Dire que désormais les superstitions et les pudeurs seront chassées des fronts étroits aux cheveux féminins ; dire que la grossièreté, le vice et l’ordure seront balayés des cœurs mâles, battant enfin pour une cause digne ; dire que l’hypocrisie est odieuse, que la sournoiserie est impie, qu’il faut arracher tous les voiles, instrument du plaisir qui dissimule. Dire qu’il faut cesser les grivoiseries et les scatologies de fumoir, qu’un corps de femme est une chose sainte, qu’un sein rayonne, étant mamelle et source de la vie humaine. Où est l’Hercule pour détourner les fleuves sur cette étable d’immondices, où est le courant qui entraînera les fausses hontes et les impudeurs déguisées, et lavera le corps sacré de toutes les épithètes de plaisir dont la bestialité humaine l’a souillé, depuis trois mille ans de littérature !


Grande-Chartreuse, 28 août, 5 h. 1/2 soir.

Quelle joie, quelle jouissance intérieure dans