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Je veux à peine lui parler. Je l’ignore. Elle m’indiffère,

Elle ne m’a jamais plu, d’ailleurs. Tout au plus m’amusait-elle par ses plaisanteries lestes et son ton canaille. Je ne lui ai jamais reconnu ni tendresse, ni grâce, ni goût d’aucune sorte, bref aucune des qualités féminines. En fait de qualités, elle n’a que celles qui se paient. J’ai presque honte qu’elle soit de ma famille.

… Si ! J’irai la voir, je dînerai avec elle, afin de deviner d’après ce qui lui manque, tout ce que vous avez, tout ce que je suis sûr de trouver en vous. C’est à cause de vous qu’elle me devient étrangère, et cependant, par elle, vous me deviendrez plus chère encore…

Car il faut me laisser croire un peu que vous avez toutes les perfections.


Mardi, 20 mai, midi.

Je suis triste ce matin, je m’ennuie, je suis mal à mon aise. Je voudrais déjà être là-bas et en avoir fini avec ces fêtes absurdes de Montpellier, qui vont m’ennuyer, je le devine, au delà de toute mesure.

Ma malle est faite : j’emporte mon grand Ronsard, la Légende des siècles, Baïf que je viens d’acheter, Heine, la Bible, Tibulle, Œdipe Roi, le VIe chant de l’Iliade, Mireille et Ausone.