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14 avril 1890. — Dizy.

Père !

Il y a un an que je ne t’ai plus.

Il y a aujourd’hui un an que je t’ai vu étendu, et calme enfin, dans ton lit, la bouche béante et stupéfaite, et les paupières abaissées. Ton front toujours contracté par la douleur, tes sourcils plissés, tes joues altérées et tremblantes ; tout cela s’était calmé, tu n’avais plus une ride ; ton dernier souffle avait emporté toutes les souillures de la maladie, et comme on t’avait posé sur tes cheveux blancs la calotte de velours que tu ne portais plus depuis longtemps, je croyais te voir encore droit et ferme comme autrefois, délivré du mal comme d’un mauvais rêve, et endormi pour un long sommeil. Mais ce que je n’oublierai jamais, c’est la « sérénité formidable » répandue sur ton visage. Tu semblais avoir été pétrifié au milieu d’une contemplation surhumaine. On avait mal fait d’étendre