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toutes les femmes est-ce moi que vous avez choisie, moi si étrangère aux secrets de l’amour qu’en vous écoutant je vous comprends à peine… moi qui ne sais ni vous répondre… ni vous céder… ni vous fuir…

— Psyché, vos yeux sont bleus comme les climats tranquilles où vos yeux d’enfant cherchaient le paradis ; mais je ne vous aime pas pour vos yeux. Vos cheveux blonds sont légers comme des ombres claires et doux comme des regards de tendresse ; je ne vous aime pas pour vos cheveux. Toute la rumeur des mers est dans une coquille et tout le frisson de l’amour est sur votre bouche ; si vos lèvres cessent de me toucher le meilleur de ma vie me quitte avec elles ; mais je ne vous aime pas pour votre bouche, Psyché, ni pour votre visage, ni pour vos chères mains. S’il se trouvait au monde une femme qui eût toute votre beauté… et qui ne fût pas vous, je ne l’aimerais pas. Vous me demandez pourquoi je vous aime ? Mais je suis votre corps, Psyché, vous êtes mon âme. »

Il serra sur sa poitrine la petite main brûlante qu’il tenait toujours et dit :

« Ne me regardez plus. Voyez où nous sommes. C’est ici que je voulais vous conduire… »

Mais Psyché ne le quittait pas des yeux. Un long regard anxieux et limpide coulait d’elle à lui, sous l’ombre des cils, continuellement.

« Voyez, dit Aimery, c’est le Vieux Château ;