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— Crie ! répéta Parrhasios.

Nicostrate poussa violemment un éclat de rire forcé qui remua la salle. Et il dit qu’il ne crierait point ! qu’il était maître de son visage ! qu’on n’attacherait pas ses traits, comme ses membres, avec des câbles à la roche ! qu’il empêcherait bien ce tableau de se faire ! puis il vomit l’écume de sa rage avec des éclats d’injures.

La face de Parrhasios ne s’altéra pas d’une ligne. Il posa le cautère qu’il tenait à la main, en prit lentement un autre qui chauffait à blanc dans le fourneau voisin, et, mesurant la place exacte où le vautour de son tableau fouillait le foie de Prométhée, il dit à un esclave sarmate :

Tiens. À droite. Sous la dernière côte. Touche légèrement, sans pénétrer.

Nicostrate vit cet homme s’avancer jusqu’à lui. Il gardait un sourire très pâle et la chair grésilla sans qu’il eût dit un mot.

Mais, bientôt, ses yeux défaillirent. Une sueur atroce coula de ses tempes. Il se mit à hurler d’abord, puis à gémir d’une voix secouée comme un sanglot de petit enfant.

Parrhasios, impassible, observait son visage.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Combien de temps ceci dura-t-il ? Je ne sais

plus. Jusqu’au soir, je pense. Je ne sais pas davantage à quelle heure j’eus la force de me traîner hors