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la délicatesse d’une peau, la fermeté d’un sein tendu, la carrure d’un poing viril. Et puis ces gens passaient à l’estrade voisine, espérant trouver mieux encore. Parrhasios fit halte un instant aux pieds d’une adolescente élancée, dont la longue forme blanche était une harmonie.

— Voilà, dit-il, une belle enfant.

Aussitôt le vendeur se précipita :

— C’est la plus belle du marché, seigneur. Vois comme elle est droite ! et comme elle est blanche ! Seize ans depuis hier…

— Dix-huit, rectifia la jeune fille, elle-même.

— Tu mens, par Dzeus ! Elle n’en a que seize, seigneur, il ne faut pas la croire. Regarde ses cheveux noirs relevés par le peigne. Quand elle les dénoue, ils lui tombent aux jarrets. Regarde ses mains, ses longs doigts qui n’ont pas même touché la quenouille. Elle est fille d’un sénateur…

— Ne parle pas de mon père, fit-elle très gravement.

— Quand je ne le dirais pas, cela se verrait, affirma le vendeur. Elle est belle comme une Néréide, souple comme une épée, douce : comme une biche au bois, — enfin voici qui vaut tout le reste : vierge comme à sa naissance.

Et la brusquant de ses mains cyniques, il nous en découvrit la preuve.

Parrhasios battait le sol sec du bout de sa canne sonore.