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forme véritable : Hagiographorum hispanorum opera selectissima.

Elle mit un doigt dans sa bouche, et se dit, après réflexion :

— Un hagiographe Hispanor… ça doit être un jeu mécanique.


Ceci décidé, sa résolution fut prise. Elle saisit avec les deux mains l’énorme in-plano presque aussi grand qu’elle, le tira, fit un effort qui tendit ses reins en arrière… Le volume, arraché de sa place éternelle, glissa, bascula, oscilla et retomba tout debout, sur la tranche.

Cile respira largement, fière de sa force, et plus encore de son audace ; mais elle ne se hasarda point à transporter une si lourde charge. Toujours avec les deux mains, elle fit tourner le premier plat sur ses gonds comme une perte sourde, et elle recula de quelques pas.


L’obscurité augmentait autour d’elle. Le jour baissait, baissait rapidement. Un long rayon, descendu d’un vitrail bleuâtre, frappait le frontispice noir du livre qu’elle venait d’ouvrir.

Une sainte espagnole y était gravée en costume de carmélite devant un paysage vaguement africain. Elle tenait un fouet d’une main, et de l’autre un grand cœur qui dégouttait de sang.

Cile, effrayée, recula encore.