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qu’un pays, plus qu’une patrie : ils étaient un monde complet fermé par des limites de pierre et régi par une déesse, âme et centre de cet univers. Tout autour s’élevait une terrasse annulaire, longue de quatre-vingts stades et haute de trente-deux pieds. Ce n’était pas un mur, c’était une cité colossale, faite de quatorze cents maisons. Un nombre égal de prostituées habitait cette ville sainte et résumait dans ce lieu unique soixante-dix peuples différents.


Le plan des maisons sacrées était uniforme et tel : la porte, de cuivre rouge (métal voué à la déesse), portait un phallos en guise de marteau, qui frappait un contre-heurtoir en relief, image du sexe féminin ; et au-dessous était gravé le nom de la courtisane avec les initiales de la phrase usuelle :


Ω. Ξ. Ε
ΚΟΧΔΙΣ
ΙΙ. Π. ΙΙ


De chaque côté de la porte s’ouvraient deux chambres en forme de boutiques, c’est-à-dire sans mur du côté des jardins. Celle de droite, dite « chambre exposée », était le lieu où la courtisane siégeait sur une cathèdre haute à l’heure où les hommes arrivaient. Celle de gauche était à la