Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 4.djvu/186

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

compliquées, aux jalousies, aux stratagèmes, aux battements de cœur de l’adultère. Ce sont elles qui nous épargnent les attentes sous la pluie, les échelles branlantes, les portes secrètes, les rendez-vous interrompus et les lettres interceptées et les signaux mal compris. Ô chères têtes, que je vous aime ! Avec vous, point de siège à faire : pour quelques petites pièces de monnaie vous nous donnez, et au delà, ce qu’une autre saurait mal nous accorder comme une grâce après les trois semaines de rigueur. Pour vos âmes éclairées l’amour n’est pas un sacrifice, c’est une faveur égale qu’échangent deux amants ; aussi les sommes qu’on vous confie ne servent pas à compenser vos inappréciables tendresses, mais à payer au juste prix le luxe multiple et charmant dont, par une suprême complaisance, vous consentez à prendre soin, et où vous endormez chaque soir nos exigeantes voluptés. Comme vous êtes innombrables, nous trouvons toujours parmi vous et le rêve de notre vie et le caprice de notre soirée, toutes les femmes au jour le jour, des cheveux de toutes les nuances, des prunelles de toutes les teintes, des lèvres de toutes les saveurs. Il n’y a pas d’amour sous le ciel, ni si pur que vous ne sachiez feindre, ni si rebutant que vous n’osiez proposer. Vous êtes douces aux disgracieux, consolatrices aux affligés, hospitalières à tous, et belles et belles ! C’est pourquoi je vous le dis, Chrysis