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Le Banquet, que tu as jadis publié au cours d’un récit moins grave, et aussi les réflexions prêtées par toi récemment à un personnage mystique qui est à la ressemblance de ton idéal, ont paru nouvelles et rares sous le règne de Ptolémée Aulète ; mais nous vivons depuis trois ans sous la jeune reine Bérénice, et je ne sais par quelle volte-face la méthode de pensée que tu avais prise de l’illustre exégète harmonieux et souriant a soudain vieilli de cent années sous ta plume, comme la mode des manches closes et des cheveux teints en jaune. Excellent maître, je le déplore, car si tes récits manquent un peu de flamme, si ton expérience du cœur féminin n’est pas telle qu’il faille s’en troubler, en revanche tu es doué de l’esprit comique et je te sais gré de m’avoir fait sourire.

— Timon ! » s’écria Bacchis indignée.

Phrasilas l’arrêta du geste.

« Laisse, ma chère. Au rebours de la plupart des hommes, je ne retiens des jugements dont je suis le sujet que la part d’éloges où l’on me convie. Timon m’a donné la sienne ; d’autres me loueront sur d’autres points. On ne saurait vivre au milieu d’une approbation unanime, et la variété même des sentiments que j’éveille est pour moi un parterre charmant où je veux respirer les roses sans arracher les euphorbes. »

Chrysis eut un mouvement de lèvres qui indi-