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ta main que j’embrasse aujourd’hui. Je t’attendais au matin, et depuis la pleine lune tu n’étais pas venu. J’ai envoyé des esclaves dans tous les quartiers de la ville et je les ai fait mourir moi-même quand ils sont revenus sans toi. Où étais-tu ? tu étais au temple ? Tu n’étais pas dans les jardins, avec ces femmes étrangères ? Non, je vois à tes yeux que tu n’as pas aimé ? Alors que faisais-tu, toujours loin de moi ? Tu étais devant la statue ? Oui, j’en suis sûre, tu étais là. Tu l’aimes plus que moi maintenant. Elle est toute semblable à moi, elle a mes yeux, ma bouche, mes seins ; mais c’est elle que tu recherches. Moi, je suis une pauvre délaissée. Tu t’ennuies avec moi, je m’en aperçois bien. Tu penses à tes marbres et à tes vilaines statues comme si je n’étais pas plus belle qu’elles toutes, et vivante, du moins, amoureuse et bonne, prête à ce que tu veux accepter, résignée à ce que tu refuses. Mais tu ne veux rien. Tu n’as pas voulu être roi, tu n’as pas voulu être dieu, et adoré dans un temple à toi. Tu ne veux presque plus m’aimer. »


Elle ramena ses pieds sous elle et s’appuya sur la main.

« Je ferais tout pour te voir au palais, Bien-Aimé. Si tu ne m’y cherches plus, dis-moi qui t’attire, elle sera mon amie. Les… les femmes de ma Cour… sont belles. J’en ai douze qui, depuis