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qu’elle a presque vingt ans et qu’elle demeure dans le quartier des Juives, à l’est de la ville, près des jardins. Mais c’est tout.

— Et sur sa vie, sur ses goûts ? tu ne peux rien me dire ? Elle aime les femmes puisqu’elle vient chez toi. Mais est-elle tout à fait lesbienne ?

— Certainement non. La première nuit qu’elle a passée ici elle avait amené un amant, et je te jure qu’elle ne simulait rien. Quand une femme est sincère, je le vois à ses yeux. Cela n’empêche pas qu’elle soit revenue une fois toute seule… Et elle m’a promis une troisième nuit.

— Tu ne lui connais pas d’autre amie dans les jardins ? Personne ?

— Si, une femme de son pays, Chimairis, une pauvre.

— Où demeure-t-elle ? Il faut que je la voie.

— Elle couche dans le bois, depuis un an. Elle a vendu sa maison. Mais je sais où est son trou. Je peux t’y mener, si tu le désires. Mets-moi mes sandales, veux-tu ? »

Démétrios noua d’une main rapide les cordons de cuir tressé sur les chevilles frêles de Melitta. Puis il tendit sa robe courte qu’elle prit simplement sur le bras, et ils sortirent à la hâte.[1]

Ils marchèrent longtemps. Le parc était immense. De loin en loin, une fille sous un arbre disait son nom en ouvrant sa robe, puis se recou-

  1. Voir le fragment reproduit à la fin du volume.