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Depuis de longues années, elle songeait à l’interdiction perpétuelle de ce seul point de la terre, et elle avait fini par imaginer que ce petit caveau défendu renfermait à lui seul toute la somme de bonheur qu’elle ne possédait pas, toutes les joies inconnues qu’elle désirait au-delà de sa vie.

Le lendemain de ce jour, elle pénétra dans le sentier.

Elle ouvrit la porte.

Elle descendit la première marche.

La deuxième.

Jusqu’en bas.

Et la nourrice accourut. Et elle cria : « Danaë ! Danaë ! Vous avez tort de venir ici. Il ne faut pas descendre, Danaë. On vous l’a défendu, vous le savez bien. Pourquoi voulez-vous toujours faire ce qu’on vous défend ? Il n’y a qu’un lieu du monde où vous ne devez pas aller, et c’est celui-là que vous voulez voir… Vous ne sortez jamais, vous ne quittez pas votre chambre sinon quand le soleil se couche ou quand un orage foudroie. Mais vous n’allez pas dans les autres villes. On ne vous voit même pas dans les champs. Vous ne seriez jamais venue ici, vous ne l’auriez jamais voulu si je ne vous avais pas dit que Polydektès le défendait. Pourquoi vous ai-je dit cela ? Pourquoi ai-je parlé puisque vous ne demandiez rien ? Je suis sûre que cela retombera sur vous. Encore une fois, écoutez-moi, Danaë. Je sais pourquoi on vous défend ce