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I


Quand Danaë, mère de Persée, eut quitté la rive d’Argolide, elle resta longtemps à la poupe, regardant la terre s’éloigner et les vagues grossir peu à peu.

Son père l’avait mise nue dans un long bateau noir avec son enfant nouveau-né, et deux petites oboles funèbres, afin qu’elle pût payer pour elle et son fils le passage de l’autre barque, quand la nuit de la mort aurait empli leurs yeux, par la faim, par le froid, ou les grands mouvements de la mer.

Bien qu’il n’y eût ni mât ni voiles, le vent poussait rapidement le canot creux et léger. Une mouette aux ailes courbes le suivit quelque temps d’un vol irrégulier, puis à tire d’ailes retourna vers la terre.

Danaë se sentit alors tout à fait seule, et, les mains sur les yeux, elle fondit en larmes.

Mais elle ne pleurait jamais bien longtemps, car