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surtout dépraver les autres. Souvent elle se mettait nue au milieu des comédiens, penchait le corps en avant, présentait sa croupe saillante, et, devant les étrangers comme devant ses amants, elle mimait avec orgueil son vice de prédilection.

Dans ce sens elle soumit son corps à des ravages si effrénés qu’elle en portait les flétrissures, non seulement aux endroits naturels comme d’autres femmes, mais même, semblait-il, jusque sur le visage. Ceux qui avaient eu commerce avec elle prenaient par cela seul la réputation de pratiquer l’accouplement en dehors de la loi de nature…

Elle suivait ensuite Hekêbolos, un tyrien qui avait été nommé gouverneur de la Pentapole. Elle passait pour lui rendre les offices les plus infects ; mais elle eut dispute avec lui et fut aussitôt renvoyée. Alors, comme elle était sans ressources, elle s’en procura désormais en prostituant son corps par la voie anormale dont elle avait pris l’habitude.

Elle alla d’abord à Alexandrie, puis parcourut tout l’Orient et rentra dans Byzance après avoir exercé dans chaque ville des talents qu’un homme ne pourrait nommer par leur nom sans offenser Dieu. De telle sorte que, sous la protection du démon, il n’y eut plus d’endroit où l’on ne connût point le vice de Théodôra.

Telles furent l’enfance et l’éducation de cette femme et c’est ainsi qu’elle fit parler d’elle plus qu’aucune autre courtisane.