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Thrasès lut en secouant la tête :

« Ce passant, dit-il, semble croire que le dieu l’a exaucé en mettant dans son lit cette fille de taverne mais les dieux n’écoutent point qui leur donne de faux noms, et ce dieu-ci n’est pas le fils des parents qu’on lui a prêtés. On l’appelle Hermaphrodite parce que c’est un hermès d’Aphroditos, le dieufemme qu’on adore en Syrie. Quant à Hermès l’immortel, jamais il ne s’est uni à Celle qui aime les sourires.

— Comment ? fit Rhéa. On m’a toujours dit le contraire. Tu es seul de ton avis.

— C’est pourquoi j’ai raison », fit Thrasès.

*

Debout, le dos à un figuier couvert de figues, les bras repliés derrière la tête, et les cheveux mêlés dans les feuilles, c’était Hermaphrodite, fille de la déesse et d’un dieu.

Toute la nuit elle était restée immobile, comme une nymphe hamadryade attachée au tronc natal.

Sans plus bouger que les herbes étendues, que les branches verticales des peupliers, que les immuables étoiles.

Et toutes les rosées du matin ayant perlé sur elle, les premiers rayons mauves de l’aube éveillaient par milliers sur sa peau de petites améthystes brillantes.