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SIRÈNE MOURANTE



La mer bruit et brille autour de la Sirène,
Sous des vols d’oiseaux grands qui portent dans leurs becs
De la neige en flocons massée aux rameaux secs,
Car l’hiver est d’argent sur la houleuse arène.

Le ciel plein d’aube que le vent bleu rassérène
Éclaire un pays blanc peuplé de temples grecs.
Et sur la mer glacée où tremblent des varechs
Les beaux oiseaux frileux s’envolent vers Cyrène.

La déesse écaillée aux yeux d’algue les suit
Du regard, vers le ciel charmé de fleurs de neige,
Et songe à leur bonheur d’échapper à la nuit…

Elle frissonne, étend sa main verte, et protège
Contre l’eau soulevée au vol gelé des vents
Sa peau déjà statue en ses doigts survivants.