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Ce n’est pas pour elle sans doute que le Koran édicte son fameux verset sur la décence des femmes[1], car elle est à peine vêtue d’une chemise, et dans bien des contrées, jusqu’au xixe siècle, cette chemise même ne lui est pas donnée avant son mariage.

Gabriel Sionite, savant religieux des Maronites du Liban, qui devint, en 1614, professeur d’arabe au Collège de France, nous dit son étonnement d’avoir rencontré dans les rues du Caire « des jeunes filles de 14 à 15 ans qui n’éprouvaient pas de pudeur à se promener sans aucune chemise, sans aucun voile, absolument nues »[2]. Il ajoute qu’aux environs du Caire et surtout sur la route de Jérusalem, cette nudité était la tenue ordinaire des jeunes filles au-dessous de quinze ans. Les caravanes chrétiennes voyaient sortir des villages cinquante jeunes personnes extrêmement honnêtes, mais toutes dans le costume d’Ashtoret, et comme il fallait bien s’adresser à elles pour acheter des provisions, cela n’allait pas sans péril de faiblesse pour les bons Maronites pèlerins.

Deux siècles plus tard, le grand ethnographe de l’Égypte, E. W. Lane, fait la même observation. « J’ai vu maintes fois dans ce pays, écrit-il,

  1. Koran, XXIV, 31, Cf XXXIII, 55 et 59.
  2. Gabriel Sionita. De nonnullis orientalium urbibus necnon indigenarum religione ac moribus, tractabus brevis. Amstelodami 1633.