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sais. Toujours est-il que le terrain fut acquis. On cessa de l’ensevelir. On le fouilla : M. Sogliano, outre son flair et sa science, possède encore sans doute le don de la persuasion. — Et si l’on eut raison de porter la pioche dans cette prairie, c’est ce dont personne ne douta plus dès qu’on eut touché le sol ancien ; il y avait là les murs, les salles et les fours d’une fonderie gréco-romaine, et dans les cendres une merveilleuse statue de bronze et d’argent : un éphèbe nu, intact jusqu’aux extrémités des doigts, ouvrant ses yeux d’émail au milieu d’un visage admirablement pur.

J’ai vu à Naples, le mois dernier, ce chef-d’œuvre inconnu qui allait être enfoui dans une tombe éternelle quand, par un instinct supérieur, un passant l’a senti vivant sous la terre et l’a sauvé pour notre joie. Athènes n’a rien enfanté de plus charmant que sa forme simple et calme. Est-ce un dieu ? est-ce un portrait ? nul n’ose encore se prononcer. Il est debout, si complètement nu qu’il a les mains vides. Pas un ornement. Pas un attribut. Il a quinze ans et il se montre, la bouche entr’ouverte et l’œil grave, comme s’il avait le sentiment que sa contemplation est sacrée.

Quels que soient les efforts, les sommes dépensées, les existences humaines usées à la tâche, jamais on ne saura trop faire pour retrouver