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vulgaire du mot ? Où est le foyer patriarcal, la tente et le piquet, le troupeau commun ? L’un habite Montluçon et l’autre Paris, si ce n’est Tananarive. Comment l’intérêt de l’aîné prétend-il balancer celui du plus jeune, celui de l’homme qui engage sa propre existence et peut, seul, décider de la valeur de son choix ? Si le fils se marie sottement, le père en rougira ; d’accord ; mais le fils se sentira bien autrement atteint si le père, veuf, se remarie avec une femme indigne, et la loi ne lui donne nul recours[1]. D’ailleurs, demande-t-on au père de juger les projets de son fils ? En aucune façon. Le silence suffit. Ce silence tient lieu de raisons. Ce silence vaut un arrêt. Cette abstention est un vote.


Eh bien, peut-être est-ce beaucoup avancer dans les sens de l’indulgence et de l’affection humaines, mais j’imagine que d’excellents pères, aussi bien parmi ceux qui cèdent que parmi ceux qui s’opposent, ne seraient pas fâchés de s’abstenir, purement et simplement, dans certains cas matrimoniaux. En exigeant leur consentement public et solennel, on les charge d’une responsabilité qui n’est pas toujours acceptée de bonne grâce. On les oblige à laisser de leur assentiment

  1. « L’enfant n’a point d’action contre ses père et mère pour un établissement par mariage. » Code Civil, art. 204.