Page:Loti, Matelot (illustration de Myrbach), 1893.djvu/266

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

renversé d’une table des objets qui s’étaient brisés et, comme une des femmes, restée de veille, s’interposait en essayant de la « raisonner », elle revint, d’un geste navrant, en briser d’autres — de ceux auxquels elle tenait le plus et qu’elle avait religieusement soignés pendant des années. Elle s’était senti une irritation d’insensée contre cette indifférente, qui voulait lui faire prendre garde à de si petites choses en un tel moment, et elle avait éprouvé ce besoin de lui bien donner à entendre qu’elle ne faisait de cas ni d’elle, ni de son raisonnement, ni de quoi que ce fût au monde, que rien ne comptait plus, que rien n’existait plus, — à présent que son Jean était mort…

Elle ne pleurait pas ; il y avait tantôt vingt-quatre heures que l’horrible petit morceau de papier blanc avait été remis dans sa main par ce matelot de la Saône, et elle n’avait pas pleuré. Son expression gardait je ne sais quoi de fermé et de fixe ; son nez s’était pincé et un pli ver-