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Mais les soirs, par les beaux temps délicieux, revenaient les heures tranquilles, les veillées aux étoiles. Sur le pont, après les radieux couchers du soleil, on se réunissait pour flâner, causer ou dormir, au balancement très doux du roulis, dans l’air infiniment pur. Par petits groupes triés, on se contait des histoires, ou l’on se chantait des chansons, en attendant l’insouciant sommeil.

Pour Jean, c’étaient, au début, des heures assombries ; il avait beau s’étendre nonchalamment comme les autres, dans un égal bien-être physique, il se sentait moins simple qu’eux, irrémédiablement moins simple. — Et puis c’étaient les seuls moments où il songeait à l’avenir, aux difficultés accumulées devant sa route, à l’argent dont il aurait besoin pour suivre plus tard ces cours, à Brest, — au travail qu’il lui faudrait pour se faire recevoir capitaine…

Non, il ne se voyait pas bien, passant cet examen-là. Il sentait d’ailleurs que, sur cette « Résolue », la vie active des muscles en lui absorbait tout ; que son intelligence