Page:Lorrain - Sensations et Souvenirs, 1895.djvu/125

Cette page n’a pas encore été corrigée

glacière, non, j’exagère ; grâce au chouberski maintenant enlevé, la température était fort supportable, mais dehors, la tourmente de neige faisait rage, et comme une démence de bruits confus et de gémissements tournoyait autour de mon corps de logis, dans le livide assombrissement du paysage.

Du moins, je le supposais tel, car je n’avais garde d’aller m’attrister l’esprit par le lugubre aspect de la campagne, et, dévêtu en un clin d’œil, je me mettais prestement au lit en soupirant : Si je pouvais au moins m’endormir !

Et je m’endormais en effet et du sommeil du juste, quand, vers deux heures du matin, un bruit inusité m’éveillait. Dehors, le vent s’était calmé ; las de siffler et de gémir, il dormait enfin autour de la maison muette, et dans le silence inquiet de la chambre, le bruit continuait à se faire entendre, saccadé et mou comme celui d’un corps qui se heurterait aux parois d’une cloison. Singulièrement ému, je prêtais l’oreille ; le bruit qui s’était tu un moment reprenait, il partait de la cheminée, le rideau de tôle en était baissé. C’était maintenant, mêlé de sourds glapissements, comme un large effarement d’ailes ; quelque oiseau de passage sans doute balayé par la tempête et tombé dans cette cheminée, où il se débattait misérablement.

D’un bond, j’étais debout, et d’un autre bond