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fenêtres, et sur la terrasse des grands pavots mauve et rose passé, de nuances exquises et comme défaillantes, se dressent.

Il est près de six heures. Comme tout respire ici le bien-être et le luxe !

Oh ! les siestes de l’après-midi, derrière les volets clos, dans la fraîcheur voulue de ce haut rez-de-chaussée obscur ; les courses du matin dans le sainfoin et les clochettes mouvantes des pelouses, les pelouses moins soignées de la lisière du parc ! Et le soir, au clair de lune, les promenades un peu gourmandes le long des espaliers du potager désert, les espaliers où l’on mord à pleines dents la chair juteuse, chaude et sucrée des prunes !

Joies délicates et inconscientes presque d’une vie de paresse et d’opulence, d’une existence aux champs d’oisive millionnaire !

D’où ce teint reposé, cet uni de la peau d’un grain soyeux et frais, ces yeux limpidement clairs et leurs prunelles violettes, des regards de fleur d’ombre, le ton de coquillage de ces petites oreilles et, à l’extrémité des mains, douces et fuselées, les mains, comme des mains d’ivoire, l’éclat nacré des ongles, des perles sur la peau.