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ton ordonnance en a été estomaqué, me dis-tu, ton ordonnance… ! Quand j’allais coucher chez toi, cet hiver, et tenir compagnie à monsieur qui s’était fait f… aux arrêts, on avait beau braver la consigne, il ne s’estomaquait pas alors si facilement, ton ordonnance… Je t’embête et je l’assomme, n’est-ce pas, il faut mieux le dire. C’est bien, je ferai mes paquets ; une chose m’étonne, c’est que tu ne m’aies pas reproché le baron qui m’entretient et le théâtre où je joue : tu étais assez fier pourtant, cet hiver, d’avoir pour maîtresse une comédienne, et les officiers de ton régiment, quand tu les amenais déjeuner et dîner chez moi, ne s’offusquaient ni de la vaisselle plate de ma table, ni des menus de mon maître d’hôtel.

D’ailleurs, j’en ai assez. Si ça t’embête tant que ça et si je suis devenue une corvée d’écurie, renvoie-moi mes lettres, je te retournerai immédiatement les tiennes, je ne m’en servirai pas, moi, pour entraver un beau mariage ; d’ailleurs ta famille ne casquerait pas, elle n’a pas le sou ta famille. Si le cœur t’en dit, rompons donc et bonsoir.

Marthe D.

P.-S. — Je dîne ce soir avec ton Sosie.