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peinte, tel un chevalier des siècles héroïques au pied du donjon de sa dame, prêt à tout pour la protéger, et quand les commissionnaires dépêchés par l’autorité étaient venus pour enlever la statue, mon homme avait bravement engagé la lutte aux pieds de sa Perversité, qui, ébranlée et secouée de toutes parts, se brisait et s’effondrait sur son socle, symbole étrange d’une œuvre ne voulant pas survivre à l’affront infligé à son créateur.

Cette aventure à la Benvenuto Cellini lui ressemblait bien en effet et, plus je le regardais avec son profil hardi, son crâne tondu ras et sa nuque violente sous la lueur frisante de sa toison, mieux je me le représentais fièrement campé devant sa statue et, les bras croisés sur la poitrine, tenant tête à la foule et défiant les gens de toucher à son œuvre. Et pourquoi cette Perversité s’était-elle effondrée subitement ? Était-ce là un pur hasard, n’y avait-il pas en cet homme du magicien ?

Il avait dû rapporter de Florence ou tout au moins de cette cour des Valois où il avait vécu entre Mme Catherine et René le Florentin, dans une société adonnée tout entière à la science des philtres et des envoûtements, il avait dû,