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L'Air et la Vitesse


géante plus caractérisé ? Combien, parce que géant, le zeppelin est-il fragile, impotent et grotesque !

Et maintenant, que peut-on dire, à ce sujet de l’aviation ?

Le docteur Pangloss trouvait que tout est bien dans la nature parce que tout y est logique, explicable. La nature est sage, elle sait s’arrêter quand il le faut ; elle a raté l’autruche et elle n’a pas insisté.

Ne cherchons pas à imiter la nature. Nous ne ferions que des monstres. Ne disons pas que l’aéroplane est un oiseau géant et efforçons-nous, au contraire, dans la conception, à nous évader de ce modèle.

Rompons franchement l’homothétie de l’oiseau qui mène hors de l’échelle et exige des artifices de construction, tels que les fils tendeurs, caractéristiques des constructions géantes. Il n’est même pas certain que si l’on trouvait des matériaux plus résistants que l’acier, plus léger que l’aluminium, les conditions du problème seraient sensiblement modifiées. Un seul élément du problème est en notre possession : la vitesse. Augmenter, augmenter toujours la vitesse. À chaque vitesse maxima propre d’avion, correspond une forme générale, une famille de plus en plus robuste, à mesure que la vitesse croît.

L’aéroplane vraiment solide, qui sera une construction, avec des matériaux de choix, sans fil tendeur d’aucune sorte, différera complètement de la forme de l’oiseau, il aura une forme propre, originale, rappelant plus celle du projectile, œuvre humaine, que celle de l’oiseau, œuvre de la nature.

En résumé, les conceptions aéronautiques présentent cette particularité curieuse que, presque toujours, elles conduisent à de très grandes difficultés de construction. Combien d’idées pourraient être rejetées a priori, avec la mention : inconstructible à l’échelle !

L’échelle, la bonne échelle existe cependant : c’est la vitesse qui la donne.