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que l’instituteur aurait négligé pour elle des devoirs non moins pressants.

Que dirons-nous donc des autres professions auxquelles se livrent les instituteurs pour suppléer à la modicité de leur revenu ! Des boutiques contiguës à la salle de classe, et qui donnent la facilité de quitter une dictée ou une récitation du catéchisme pour aller débiter aux chalands le tabac à fumer ou le demi-setier en deux verres (239) : des écoles où l’instituteur sabotier, forgeron, charpentier, ou tonnelier étourdit ses élèves du bruit de son marteau : il est impossible de ne pas sentir la justesse de toutes les objections que les inspecteurs ont dû élever contre ce cumul d’occupations incompatibles (240). Et cependant, non seulement c’était une nécessité de leur état, car quel autre moyen de subsistance leur restait-il pendant huit mois de l’année ? mais on peut dire avec vérité que c’étaient encore là les hommes qui faisaient le plus d’honneur à l’enseignement primaire.

Il convient, en effet, de reconnaître trois classes d’instituteurs : les uns à poste fixe, établis, peut-être nés dans l’endroit, quoique cette classe de citoyens soit essentiellement nomade par nature (241) ; ceux-là étaient, en général, obligés d’avoir un autre état, mais leur résidence assidue dans la commune, le soin et l’intérêt de leur petit commerce leur imposaient l’obligation d’être assez honnêtes gens, et de ne point perdre une considération dont ils avaient besoin tous les jours pour leur achalandage. À cette catégorie vous ne reprochiez d’ordinaire que les défauts communs aux gens de leur profession, l’habitude des cabarets, par goût peut-être, et puis aussi par entraînement, car on sait que, dans les campagnes, tous les marchés se concluent le verre à la main (242).

Ces honnêtes gens de l’instruction primaire compre-