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devra deux ou quatre fois (112) par jour franchir le pont fatal (113).

Nous avons en France combien de communes où les chemins sont impraticables pendant l’hiver, combien de pays de montagnes où il est impossible de reconnaître le soir la sente que l’on a suivie le matin, et où les vents ont amoncelé assez de neige pour en faire votre tombeau (114) ; combien où les loups et même les ours cherchent leur proie (115) ; enfin, on ne sait pas assez qu’il y a telle commune qui, par défaut de communication, reste isolée six mois de l’année, et n’a rien de mieux à faire que de se tapir comme la marmotte en attendant le réveil du printemps (116).

Mais au moins, dira-t-on, s’il est vrai que quelques hameaux, quelques fermes isolées, quelques habitations éparses sont condamnées, par leur position, à se passer d’école, toujours est-il que la population agglomérée presque tout entière dans le chef-lieu, la vraie commune enfin n’éprouvera pas cet inconvénient. Malheureusement c’est une erreur assez générale que de croire la population d’une commune ainsi ramassée dans le bourg ; c’est plutôt là l’exception. Certainement, si l’on jugeait des villages par ceux de la banlieue de Paris, du Poitou par l’arrondissement de Sceaux, des Landes par Saint-Cloud et par Vincennes, on serait fondé à croire que le noyau de la population d’une commune est au cœur même du chef-lieu. Mais, si oubliant un moment les préjugés parisiens, on ne compare plus ces villes mal à propos travesties sous le nom de villages à ceux des campagnes, on verra (les pièces nombreuses auxquelles nous renvoyons en font foi) (117), que, le plus souvent, fort embarrassés de fixer un chef-lieu dans une commune éparpillée sur 7 (118) ou 9 lieues de tour, ou comprenant onze paroisses (119), les administrateurs, par une fiction nécessaire, en ont honoré quelques amas d’habitations plus ou moins considéra-