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La réunion de ces erreurs de prononciation présenterait de plus une étude intéressante aux personnes qui s’occupent de la formation de la langue française. Je suis convaincu que les différences nombreuses observées partout non-seulement dans l’accent, mais dans les inflexions du son et particulièrement des désinences, mettraient souvent sur la trace des idiomes divers parlés par chaque peuplade des Gaules, au moment de leur réunion à la langue commune. J’en dirais autant des mots et des locutions de pays qu’il ferait bon recueillir pour ne point les perdre. Le temps détruit tous les jours ces ruines. Les rapports plus fréquents du citadin et du propriétaire avec les journaliers et les paysans épureront insensiblement leur langage : l’instituteur est mieux placé que personne pour hâter ce progrès, comme aussi pour recueillir ces derniers soupirs des langues qui ne sont plus : et, qu’on me passe ce paradoxe, pour l’étude des origines de la nôtre, il y a peut-être moins à profiter aujourd’hui dans les chartes de nos souverains où on les cherche, que dans le jargon du paysan qu’on néglige.

L’usage pratiqué dans les campagnes de ne faire lire l’écriture que dans des contrats ordinairement de la main du même tabellion, et d’une date fort ancienne, retarde aussi les progrès. Les manuscrits lithographiés, surtout quand ils reproduisent un choix d’écritures variées avec discernement, sont infiniment préférables (340). Ils accoutument l’élève à pouvoir aisément lire des lettres de toute main, et, quand on a eu soin de choisir pour les lithographier des sujets d’utilité réelle, ces cahiers ont encore ce précieux avantage sur les contrats qui ne laissaient dans la mémoire des enfants, avec une orthographe vicieuse ou surannée, que des termes de pratique demi-barbares, et peut être en germe le goût