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a pour elle une longue expérience déjà de ce qu’elle peut faire, et n’est pas disposée à se laisser imposer des réformes dont elle ne reconnaît pas l’utilité. De plus, concentrée jusqu’à présent en elle-même, elle ne se mêle pas volontiers aux nouvelles combinaisons sociales et politiques, elle en redoute même peut-être l’influence, et, dans tous les cas, elle s’en isole par prudence. Jusques là, rien de mieux, si elle peut se suffire par ses seules forces. Mais, il n’en est rien : les charités qui la soutiennent dans ses disgrâces ne sont pas intarissables : elles n’auront qu’un temps comme les passions politiques qui souvent les inspirent : elles ne présentent pas un mode de perception aussi honorable ni aussi solide que les fonds votés dans le budget d’un conseil municipal, et la prospérité précaire dont jouit l’institut des frères ne les aveugle pas : ils sentent combien il serait important pour eux de rester en possession du titre d’instituteurs communaux, au lieu d’être réduits à ouvrir des écoles privées. Déjà, pour mériter de conserver ces avantages, ils se sont résignés, malgré l’esprit de conservation qui les distingue, à introduire dans leur méthode des améliorations importantes : la concurrence les a avertis, et ils ont compris leur intérêt : ils ont profité, même de l’enseignement mutuel. Leurs maîtres sont plus instruits, leurs procédés meilleurs, leurs livres surtout ont subi une réforme bien entendue ; enfin, quoique l’expression soit peut-être bien hardie, en parlant des frères, il y a eu une révolution dans leur enseignement (270).

Mais elle s’est arrêtée là, et ce n’est pas là qu’il suffisait de l’introduire. Les statuts des frères leur défendent d’accepter aucun argent des familles pour l’instruction qu’ils doivent aux enfants : La loi, en offrant dans les écoles communales l’instruction gratuite aux indigents, a au contraire exigé que les autres y payassent une rétribution fixée par les autorités municipales.